Les enfants m’ont réveillé à 6h30 du matin.
Ils sont excités, car ils vont passer la journée à la maison. Je leur prépare le petit déjeuner. Je m’éclipse pour faire un footing en prenant soin de bien poser mon masque sur ma bouche et non pas mon nez.
Quand je reviens, Nina est en larme.
Elle m’annonce que «le confinement durera autant qu’il le faudra » et qu’on risque de manquer de PQ.
Je l’entends chantonner « Partir avec les miens » de Balavoine.
Je la rassure en lui disant qu’elle va jouer le rôle de sa vie en faisant l’institutrice.
Je suis terriblement inquiet pour sa santé mentale. On va peut-être tous mourir, mais j’ai le sentiment de déjà partir un peu.
Je prends ma douche et je pars travailler.
A la radio, j’entends les derniers chiffres de la contagion.
Je passe devant un supermarché, les gens sont collés les uns aux autres. La distanciation, c’est pas encore ça. Il ne faut pas rêver, le pays entier va sombrer. Les gens ne savent pas mesurer un mètre, alors pour comprendre des règles…
Je n’ai rien de prévu, alors je file dans une forêt creuser un trou et m’asseoir dedans.
C’est un rituel. L’odeur de la terre, sa texture, son enrobage me détendent.
Si je meurs du coronavirus, je veux être enterré à même la terre.
Au bout d’une demi-heure, rassasié par la nature, je sors de mon trou. Je me dirige vers le coffre de la voiture.
Pas un bruit.
Je sors une arme pour faire une petite blague.
J’essaie de tirer sur un arbre, mais je le rate. J’entends un cri. Je monte dans ma voiture et je fonce à travers la départemantale.
Je rentre vers 17h.
Je ramène six rouleaux de PQ.
Nina m’annonce que Mathéo n’est peut-être pas le génie que l’on croit.
Il semblerait qu’il n’arrive pas à apprendre par coeur la table de 7.
21h : les enfants sont couchés.
Nina semble au fond du trou.
Pour la faire rire, je décide de lancer un visio-apéro.
C’est très à la mode au bureau.
Je compose un numéro au hasard.
Un couple de quadras originaire du PACA décroche. Ils semblent heureux de mon initiative.
Nous trinquons au whisky et échangeons sur les turpitudes du confinement.
Vers 22h, ils se mettent à poil et le mec commence à tringler la fille.
Je n’arrive pas à couper la communication.
Nina est choquée.
Nous allons nous coucher.